top of page

La chute

Allongé au sol, le ciel pour seul paysage, dans une lumière épaisse et éblouissante, une main se tend vers moi. Encore un rêve froid, aussi glacé que la fêlure dans laquelle je me trouve. 

 

Emilie m’avait prévenu. « Tu prends un mauvais chemin. »

Nenni. J’en ai fait qu’à mon envie, tête baissée, persuadé d'atteindre le sommet sans difficulté. La chemin semblait sûr, tout tracé.

 

 

Au début, tout se passait comme planifié. Le vent s’est ensuite levé ; une brise légère. Puis les premiers nuages se sont pointés et le vent a forci. Ces difficultés n'étaient pas prévues. Pourtant mon ascension restait agréable, pimenté ; un défi à ma hauteur. Des bourrasques me giflèrent soudainement alourdissant mon paquetage et mon pas.  Un regard en arrière et je mesurais le chemin parcouru. Rien que pour cet exploit j'étais déjà quelqu'un.

Mais le sommet était si proche, impossible de me dégonfler. « je serai un exemple pour mon entourage »

 

Dans un coin de ma tête la voix d'Emilie raisonnait «arrête toi avant qu'il ne soit trop tard». J'aurais tout donné pour lui donner tort et pour qu'elle soit fière de moi.  Les nuages obscurcirent le paysage, l'orage me poignardaient les oreilles, les éclairs me tailladaient les yeux, les vents mes lardaient les flancs, la neige embruma ma vue. Venant du fin fond du monde, un grondement me happa entre éboulement et effondrement dans une chute sans fin.

 

Impossible de me relever, autour de moi tout est blanc. Le poids du désastre me plaque au sol. Entre pierre et glace, les murs de ma prison sont hostiles, sépulcrales. Je ne peux m'en prendre qu'à moi-même, seul responsable de ma faute, incapable de me satisfaire de ce que j'ai déjà.

 

Alors que le froid m'emporte dans les tréfonds de mon être, une douce chaleur me remonte. Dans une lumière réconfortante, une main est tendue sur mon visage. Emilie est au dessus de moi tel un jour nouveau. Son sourire est une renaissance, un nouveau chemin à parcourir, la plus grande aventure de ma vie.

bottom of page